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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/238

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TRAITÉ DES METAVX ET ALCHIMIE.


Theorique.


I l me semble que tu as assez parlé des fontaines : ie voudrois que suyuant ta promesse tu m’eusses donné quelque connoissance du fait des metaux. Car ie sçay qu’il y a vn grand nombre d’hommes en France, qui se trauaillent tous les iours à l’œuure de l’Alchimie, et plusieurs y font de grands proufits, ayants trouué de beaux secrets, tant pour augmenter l’or et l’argent, qu’autres effects : choses que ie voudrois bien sçauoir et entendre.

Practique.

Par là tu peux connoistre combien l’insatiable auarice des hommes amene de maux en ce bas siecle. Il n’est abus entre les hommes qui cause plus de larcins et tromperies que l’auarice, ainsi qu’il est escrit, que l’auarice est racine de tous maux. Il est certain que plusieurs desirans d’estre riches se sont enuelopez en plusieurs douleurs : suyuant quoy ie ne puis mieux connoistre que tu veux estre compris au rang des auaricieux, que de ce que tu desires sçauoir, faire ou augmenter l’or ou l’argent. Car plusieurs actes auaricieux se peuuent cacher par hypocrisie. Mais quant est de ceux qui veulent faire l’or et l’argent, leur auarice ne se peut cacher, et leurs intentions ne peuuent estre mises en autre rang qu’en celuy des conuoiteux et ventres paresseux, qui pour obuier à trauailler à quelque art vtile et iuste, voudroyent sçauoir faire de l’or et de l’argent, afin de viure à leur aise, et se faire grands à peu de labeur : et estants menez d’vne telle conuoitise, ne pouuant paruenir à faire ce qu’ils cherchent, ils vsent de ce qu’ils peuuent, iuste ou iniuste. Voila vn point que tout homme de bon esprit auroit honte de me le nier : parquoy si tu m’en veux croire tu ne mettras iamais ton affection à ces choses.