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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/242

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DES METAVX

puis entendre : d’autant que ie sçay qu’il est permis à l’homme de semer de toutes especes de semences, et ce pendant tu appelles les metaux semences diuines, et tu me veux empescher de les semer.

Practique.

Tu as beaucoup mieux dit que tu ne pensois, que les matieres des metaux sont semences diuines. Ie di tellement diuines qu’elles sont inconnuës aux hommes, voire inuisibles : et de ce n’en faut douter, et croy que si me mets apres pour te le prouuer, ie te le monstreray si clairement que tu seras contraint d’accorder mes fins et conclusions.

Theorique.

Ie te prie donc de m’en faire le discours tout au long, par lequel ie puisse connoistre ton dire estre veritable.

Practique.

Il faut donc que tu tiennes pour chose certaine, que toutes les eaux qui sont au monde qui ont esté et seront, furent toutes creées en vn mesme iour, et si ainsi est des eaux, ie te di que les semences des metaux et de tous mineraux et de toutes pierres ont esté creées aussi en vn mesme iour : autant en est il de la terre, de l’air et du feu, car le souuerain createur n’a rien laissé de vuide, et comme il est parfaict, il n’a rien laissé d’imparfait. Mais (comme ie t’ay dit tant de fois, en te parlant des fontaines) il a commandé à nature de trauailler, produire et engendrer, consommer et dissiper ; comme tu vois que le feu consomme plusieurs choses, aussi il nourrit et soustient plusieurs choses ; les eaux desbordees dissipent et gastent plusieurs choses, et toutesfois sans elles nulle chose ne pourroit dire ie suis. Et tout ainsi que l’eau et le feu dissipent d’vne part, ils engendrent et produisent d’autre. Suyuant quoy ie ne puis dire autre chose des metaux, sinon que la matiere d’iceux est vn sel dissoult et liquifié parmy les eaux communes, lequel sel est inconneu aux hommes : d’autant qu’iceluy estant entremeslé parmi les eaux, estant de la mesme couleur que les eaux liquides et diafanes ou transparentes, il est indistinguible et inconnu à tous : n’ayant aucun signe apparent, par lequel les hommes le puissent distinguer d’auec les eaux communes. Voila vn trait singulier, lequel (comme ie pense) est caché et inconneu à beaucoup d’hommes qui pensent estre bons phi-