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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/256

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DES METAVX

inconneuz en toutes natures, que de tant plus vn homme sera sçauant en philosophie, de tant plus il craindra les hazards qui suruiennent ordinairement en toutes entreprises fusibles, metalliques, et vulcanistes. N’est ce pas chose estrange et de grande consideration qu’il y a à Montpelier certaines eaux où l’on reduit le cuyure en verd de griz, et tout auprez d’icelle, il y a autres eaux où l’on n’en sçauroit faire ? N’y a il pas aussi des eaux qui sont bonnes aux teintures et à cuire legumes, et autres eaux bien pres d’icelles n’y vaudront rien. I’ai veu du temps que les vitriers auoyent grand vogue, à cause qu’ils faisoyent des figures és vitreaux des temples, que ceux qui peignoyent lesdittes figures n’eussent osé manger aux, ny oignons. Car s’ils en eussent mangé la peinture n’eust pas tenu sur le verre. I’en ay connu vn nommé Iean de Connet, par ce qu’il auoit l’alene punaise, toute la peinture qu’il faisoit sur le verre ne pouuoit tenir aucunement, combien qu’il fust sçauant en son art. Les historiens disent que s’il y a vne palme plantee sur le bord d’vn fleuue, et vne autre de l’autre costé dudit fleuue, que les racines iront de l’vn à l’autre par dessous ledit fleuue, à cause de l’amitié ou affinité qu’elles ont ensemble[1]. Il est certain aussi que les femmes alaictantes, estans loing de leurs enfans endormis, sentent à leurs mammelles quand ils crient estant esueillez. I’ay veu vne femme pudique, saige et honorable, que quand son mary estoit aux champs, elle sentoit par quelque mouuement secret, le iour que son mary deuoit arriuer. Tels mouvemens ne sont pas seulement aux creatures humaines et brutales, mais aussi aux vegetatiues et metalliques. Et tout ainsi comme les matieres animées se servent de choses alimentaires, et en ayant pris la substance nutritiue, enuoyent le demeurant és vaisseaux excrementaires, semblablement les metaux engendrent quelques excrements inutiles apres leur formation. Ie prens donc le souphre comme vne colofaigne (colophane) ou excrement qui a servi à la generation, laquelle estant perfaite les excrements n’y seruent plus de rien, et si cela aduient és creatures humaines et brutales, aussi fait il à tous vegetatifs. Et qu’ainsi ne soit,

  1. Il est peut-être inutile de remarquer qu’il s’agit ici d’un phénomène interprété, à cette époque, à l’aide d’une supposition erronée, mais aujourd’hui parfaitement expliqué par le transport du pollen de la plante mâle à la plante femelle par l’intermédiaire des vents.