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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/261

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ET ALCHIMIE.

le sel commun et autres, pour te faire entendre que tout ainsi que le sel n’a aucune couleur estant liquide dedans l’eau, que aussi les matieres metalliques n’ont aucune couleur, iusques à leur congelation. Mais ils la prennent en se r’assemblant et congelant : tout ainsi que toutes especes de fruits changent de couleur en leur croissance et maturité. Si ie voulois alleguer les semences humaines et brutales, y trouuera on quelque couleur au parauant leur formation ? non, non plus qu’aux metaux. Ie t’ay desia dit-cy dessus que tu n’as iamais veu souphre, ne vif argent, qui ne fut congelé, et qu’au parauant ils n’estoyent pas de la couleur qui sont à present, et qu’ils estoyent inconnus, comme le sel est inconnu dedans l’eau de la mer. Il y a long temps que ie pensois faire fin au propos de l’alchimie, estimant qu’en parlant des pierres tu pourrois connoistre la verité de mes preuues : Mais par ce que ie te trouue de dure ceruelle et par trop arresté en ton opinion, ie suis contraint pour conclure à ce que dessus, te dire qu’il ne se peur entendre autre chose des metaux, sinon ce que les natures humaines, brutales et vegetatiues me donnent à connoistre : Qui est, que quand la chastaigne, la noix et tous autres fruits, sont semez en terre, en iceux sont enclos les racines, les branches, les feuilles, et toutes les parties, vertus, senteurs et couleurs, que l’arbre sçauroit produire quand il sera né. Aussi qu’en la semence des natures humaines et brutales, les os, la chair, le sang et toutes les autres parties sont comprises en laditte semence. Et tout ainsi que tu vois que nulle de ces choses ne demeure en sa premiere couleur : mais en la croissance d’iceux ils changent de couleur, et en vne mesme chose y a plusieurs couleurs : En cas pareil te faut croire que les semences des metaux (qui sont matieres liquides et aqueuses) changent de couleur, pesanteur et dureté. La premiere connoissance que i’ay eu de ces choses, fut à vne miniere de terre argileuse, qui estoit à vne tuilerie pres saint Sorlin de Marennes és isles de Xaintonge, là où ie trouuay parmy laditte terre vn grand nombre de marcassites de diuerses grandeurs et pesanteurs, toutes lesquelles estoyent formees de telle sorte que l’on pouuoit iuger, que la matiere de leur formation estoit liquide, et qu’elle estoit cheute du haut en bas, és iours de sa congelation, tout ainsi que si l’on