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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/269

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ET ALCHIMIE.

tres fruits, contre mon opinion de l’alchimie : mais cela ne fait rien contre moy : par ce que les metaux sont vn, et les fruits sont vn autre.

Practique[1].

I’ay grand honte que ce propos dure si longuement : toutes fois à cause de ton opiniatrise ie suis contraint de parler encores de ce fait. Es tu si grand’ beste que tu ne consideres le fait de l’aymant, qui par vne vertu singuliere attire à soy le fer, combien qu’il n’ait aucun ame vegetatiue, et si ainsi est hors de la matrice de la terre, combien cuides tu qu’il y aye plus de vertu estant en la terre, quand il est encores en matiere liquide ? Et cuides tu que l’aymant soit seul qui ait pouuoir d’attirer à soy les choses qu’il aime ? ne voy tu pas bien que le Iayet et l’Ambre attirent à eux le festu ? Item, ne voy tu pas bien que l’huille estant ietté dedans l’eau se ramasse à part de l’eau ? Veux tu meilleure preuue que du sel commun, du salpestre, de l’alun, de la coperoze, et de toutes especes de sels, qui estans dissoulz dedans l’eau se sçauent tres-bien separer et faire vn corps à part, distingué et separé d’auec l’eau ? En confirmant ce que ie t’ay dit cy dessus, ie te dy encores que la semence des metaux est liquide et inconnue aux hommes, tout ainsi comme le sel dissoult, ne se peut connoistre parmy l’eau commune iusques à sa parfaite congelation : Aussi pour tout certain la semence des metaux ne se peut connoistre estant en matiere liquide entremeslée parmi les eaux, iusques à sa congelation : Et tout ainsi que ie t’ay dit que la semence du sel liquide se sçait separer de l’eau commune pour se congeler, autant en est-il des matieres metalliques. Et te faut ici philosopher encores de plus pres. Regarde les semences, quand tu les iettes en terre, elles n’ont qu’vne seule couleur, et en venant à leur croissance et maturité elles se forment plusieurs couleurs, la fleur, les fueilles, les branches, les rameaux et les boutons, seront toutes couleurs diuerses, et mesme à vne seule fleur il y aura diuerses couleurs. Semblablement tu trouueras des serpens, des chenilles et des papillons, qui seront figurez de merueilleuses

  1. Quoique ce passage soit la répétition presque littérale de ce qui a été rapporté ci-dessus, page 211, nous avons cru devoir le reproduire, comme les précédents éditeurs, et conserver religieusement le texte, tel qu’il fut publié du vivant de l’auteur.