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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/329

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DES PIERRES.

taignes de mer, escreuices, burgaulx, et de toutes especes de limaces, qui habitent en ladite mer Oceane, si est-ce que i’en ay trouué en plusieurs lieux, tant és terres douces de Xaintonge que des Ardennes, et au pays de Champagne d’aucunes especes, desquelles le genre est hors de nostre connoissance, et ne s’en trouue point qui ne soyent lapifiées : parquoy i’ay osé dire à mes disciples que Monsieur Belon et Rondelet auoyent pris peine à descrire et figurer les poissons qu’ils auoyent trouuez en faisant leur voyage de Venise, et que ie trouuois estrange qu’ils ne s’estoyent estudiez à connoistre les poissons qui ont autrefois habité et generé abondamment en des regions, desquels les pierres où ils ont esté petrifiez en mesme temps qu’elles ont esté congelées, nous seruent à présent de registre ou original des formes desdits poissons. Il s’en treuue en la Champagne et aux Ardennes de semblables à quelque espece d’aucuns genres de pourpres, de buccines, et autres grandes limaces, desquels genres ne s’en trouue point en la mer Oceane, et n’en void on sinon par le moyen des Nautonniers, qui en apportent bien souvent des Indes et de la Guinee. Voila pourquoy i’ay conneu qu’en plusieurs et diuers endroits des terres douces il y a eu autrefois habitation et generation desdits poissons, et ce d’autant, comme i’ay dit, qu’il s’en trouue aucuns qui ne sont encores petrifiez, parce qu’ils ne le peuuent auoir esté à cause que la terre où ils viuoyent est encores terre, ou pour mieux dire sable. Mais les autres qui se trouuent dedans les pierres des montagnes se sont petrifiez lors que le lieu où ils habitoyent s’est conglacé, sçauoir est, l’eau et la vase, et tout ce qui y estoit, comme ie t’ay dict tant de fois, pour te le mieux faire entendre. Tu verras en mon cabinet, que i’ay dressé pour cela, plusieurs formes desdits poissons, de ceux qui sont armez : par ce qu’il s’en trouue bien peu d’autres de petrifiez : à cause que les parties plus tendres se putrifient au parauant estre petrifiez : et qu’ainsi ne soit i’ay trouué plusieurs escailles ou armures de locustes et escreuices petrifiées, qui estoyent separées l’vne d’auec l’autre, pour cause de la putrefaction qui estoit suruenue en la chair, auparauant la petrification : toutesfois i’ay trouué aux montagnes des Ardennes de ces grands moules, qui habitent communement es estangs, que le poisson estoit aussi bien petrifié comme la coquille.