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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/393

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DE LA MARNE.

chers estoient causés de la matiere mesme qui ayde à la generation des semences : et toutesfois i’ay veu des pays que toutes les terres estoient incrustées de rochers et pierres, et les terres qui sont telles ont bien peu de terre sur le rocq, et les semences qui y sont iettées, ne peuuent gueres profiter, ains les bleds demeurent bas, ayant les espics bien petits, par ce que la plante ne peut prendre nourriture sur le rocq.

Practique.

N’as tu pas entendu vn propos que ie t’ay dit, que si le sel ne se venoit à dissoudre, les lards, poissons, et toutes especes de chairs ne pourroient estre salées, si le grain du sel demeuroit en son entier sans se dissoudre et diminuer ? Si le pays qui est ainsi pierreux est de telle nature que les pluyes qui tombent dessus ayent en elles vne si grande quantité d’eau congelatiue, qui tombant d’en haut, fait vne croutte en augmentant les rochers couuerts d’vn peu de terre, cela ne fait rien contre mon propos : car ie t’ay dit que depuis que l’eau est congelée et reduitte en pierre, les semences n’en peuuent tirer aucune liqueur, si la pierre n’est premierement dissoute, comme ie t’ay dit que la chair ne pourroit rien prendre du sel, sinon en tant qu’il se dissout et diminue. Voila vne conclusion toute certaine.

Theorique.

Si est-ce pourtant que i’ay veu plusieurs forests és parties montagneuses, esquelles les arbres sont merueilleux en grandeur, combien que la sole d’iceux n’est que rocq, auec vn bien peu de terre par dessus la superficie des rochers, et les racines desdits arbres sont à trauers et parmi les rochers des montagnes.

Practique.

Si tu eusses bien noté ce que ie t’ay dit en traitant des pierres, tu n’eusses mis vn tel argument en auant : car tu dois entendre que les racines des arbres ne sçauroyent transpercer les rochers. Il te faut donc croire que les arbres auoyent prins racine au parauant que la terre où ils sont fut congelée, et comme les arbres ont prins en leur croissance abondamment de l’eau generatiue, ils en ont distribué aussi bien aux feuilles et aux fruits, comme aux branches et comme aux racines : et par ce que les feuilles et fruits tombent par chacun