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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/402

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DE LA MARNE.

putrifiées se peuuent reduire en pierre, mais aussi aucune chose sans perdre leur forme, comment est il possible que l’eau que tu dis puisse entrer dedans les corps solides, si premierement ne sont molifiées par putrefaction ?

Practique.

Comment oses tu dire le contraire de ce que i’ay dit, veu qu’en te parlant de l’essence et forme des pierres, ie t’ay monstré plusieurs coquilles reduites en pierre, combien que les coquilles estoyent au parauant autant solides que pourroit estre vn vaisseau de verre, ou de quelque matiere metallique.

Theorique.

Il faudroit donc qu’il n’y eut rien qui ne fut poreux, et si ainsi estoit, les vaisseaux ne pourroient contenir l’eau de quelque matiere que ce soit, et toutesfois l’on voit le contraire.

Practique.

Ie ne doute point que toutes choses ne soyent poreuses, mais ces choses qui sont faites des matieres plus condensées ont les pores si subtils que les liqueurs ne peuuent passer à trauers euidemment, sinon par quelque accident : comme tu as veu autrefois que quand ie voulois broyer mes couleurs en hyuer, ie faisois chauffer la molette, et apres l’auoir posée sur le marbre toute chaude, icelle molette pour sa chaleur attiroit de l’eau dudit marbre, combien qu’iceluy marbre eut apparence d’estre bien sec : voila vn argument qui te doit faire croire que le marbre estoit poreux, à trauers desquels pores, la chaleur de la molette faisoit attraction de l’humidité. Autre exemple : tu sçais bien que les forgeurs d’armes et de taillans, quand ils veulent endurcir les armes et taillans, ils les font chauffer tant qu’ils soyent rouges, et puis les mettent froidir dans l’eau ; lors les trenchants des ferrements et armures deuiennent beaucoup plus durs. Ie te demande si le fer ou l’acier, estant ainsi trempé, ne prenoit quelque substance iusques au centre, et par toutes les parties s’ils se pourroyent endurcir par l’action de l’eau ? on sçait bien que non : car si le trenchant, ou le harnois ne s’endurcissoit que sur la superficie, cela ne seruiroit de rien. Il faut donc conclure que les armures estans chaudes, sont imbibées, et font attraction de quelque eau, autre que l’exalatiue, laquelle subuient et se