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DE LA MARNE.

ils mettent parmy la mine de fer pour aider à la fonte d’icelle mine, et ceux de Dagny et Giuonne prennent pour la mesme cause de la pierre de laquelle l’on se sert à faire de la chaux, qu’ils appellent pierre de castille, laquelle ils cassent pour aider à la fonte de leurs mines comme i’ay dit. Vois tu pas par là vne preuue evidente, puis que les sels des arbres aident à faire fondre toute chose, qu’il y a vne vertu salsitiue és pierres, et consequemment és terres qui ne sont encores lapifiées comme celle de laquelle l’on se sert à Haraucourt, puis qu’elle fait la mesme action que font les pierres de Dagny et Giuonne.

Theorique.

Il semble que tu te contredis, en ce que tu dis quelquesfois que les pierres sont congelées par la vertu du sel, et puis apres tu dis que c’est vne eau.

Practique.

Il me semble que tu as vne ceruelle bien dure, car il me souuient t’auoir dit au precedent qu’on n’a point accoustumé d’appeller l’eau de la mer sel, combien qu’elle soit sallée : mais bien on l’appelle eau iusques à ce qu’elle soit congelée, et depuis on l’appelle sel ; on n’appelle pas aussi l’eau glacée, auparauant qu’elle soit gelée, mais estant gelée on l’appelle glace : on n’appelle point le lait fromage auparauant sa congelation, semblablement ie ne puis appeler les choses susdites en autre terme qu’en la forme où elles sont alors que i’en ay parlé depuis auoir escrit au precedent. Ie trouue tesmoignage certain contre ceux qui disent que la marne ne profite guere aux champs la premiere année ; il est certain que si fait, autant bien que la suyuante, moyennant qu’elle soit mise aux champs auparauant que l’hyuer aye commencé, parce que la marne ne peut de rien seruir, si elle n’est premierement dissoute par les gelées. I’ay esté aussi aduerty par les habitans de Champagne, de Brie et Picardie, qu’en certains lieux, la marne n’est autre chose que craye, et d’autant qu’en plusieurs contrées desdits pays, il y a faute de pierre, et sont contrains quelquesfois de faire des murailles de craye, quand ils trouuent quelque fosse où elle sera bien condencée et reduite en craye ; cela ne se peut faire en toutes marnieres, parce qu’aucunes ne se peuuent tirer que par petites pieces, et mesme il y en a qui sont encores liquides et bourbeuses. Et