Aller au contenu

Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
4

quatre millions de boisseaux de grain, par chacun an, en la France, plus que de coustume, pourueu qu’on veuille suiure mon conseil : ce que i’espère que vos sujets feront, après avoir receu l’aduertissement que i’ay donné en ce liure. Item, parce que vous estes un Seigneur puissant et magnanime, et de bon iugement, i’ai trouué bon de vous désigner l’ordonnance d’un iardin autant beau qu’il en fut iamais au monde, horsmis celuy du Paradis terrestre, lequel dessein de iardin, je m’asseure que trouuerez de bonne inuention.

Item, en ce liure est contenu le dessein et ordonnance d’une ville de forteresse, telle que iusques ici on n’a point ouy parler de semblable. Il y a audit liure plusieurs autres choses fructueuses que ie laisseray dire à ceux qui en les lisant les retiendront et vous en feront le récit. Je n’ay point mis le portrait dudit iardin en ce liure, pour cause que plusieurs sont indignes de le veoir, et singulièrement les ennemis de vertu et de bon engin : aussi que mon indigence et occupation de mon art ne l’a voulu permettre. Je say qu’aucuns ignorans, ennemis de vertu et calomniateurs diront que le dessein de ce iardin est un songe seulement, et le voudront peut estre comparer au songe de Polyphile, ou bien voudront dire qu’il seroit de trop grande despence, et qu’on ne pourroit trouuer lieu commode pour l’édification dudit iardin, iouxte le dessein. À ce je responds, qu’il se trouuera plus de quatre mille maisons nobles en France auprès desquelles se trouueront plusieurs lieux commodes pour édifier ledit iardin, iouxte la teneur de mon dessein : Et quant à la despence, il y a en France plusieurs iardins qui ont plus cousté qu’icelui ne cousteroit. Quand il vous plaira me faire l’honneur de m’employer à cest affaire, ie ne faudray à vous en faire soudain un pourtrait, et mesmes le mettray en exécution, s’il vous venoit à gré de ce faire. Et quand est du dessein et ordonnance de la ville forteresse, ie say qu’aucuns diront qu’il ne se faut arrester à mon dire, d’autant que ie n’ay point exercé l’estat militaire, et qu’il est impossible de savoir faire ces choses sans avoir veu premièrement plusieurs batteries et assaux de villes. À ce ie responds, que l’œuure que i’ai commencée pour Monseigneur le Connestable rend assez de tesmoignage du don que Dieu m’a donné pour leur clore la bouche : car s’ils font inquisition, ils trouueront que telle besongne n’a oncques