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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/166

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

Joannis lui-même. Simbad le marin est un infaillible amateur de peinture. S’il était, à l’Opéra, plus préoccupé d’écouter la musique, et moins curieux de juger l’effet que son luxe étrange produit sur la compagnie, il serait un gentleman achevé.

Toutefois, j’ai idée que son orientalisme est un tantinet bourgeois et que je ne sais quel laisser-aller ferait mieux son affaire. Cet homme supérieur, qui sait nager, tirer l’épée et le pistolet, qui perce les parois des maisons et ranime les mourants, qui fait profession de sauver la vie des bandits pour chagriner les procureurs et fréquente aux quatre coins du monde après avoir tout vu, tout usé, cet homme rare est « excentrique », et il veut être tenu pour tel. Il achète un brevet de comte, et il y tient : le baron Poirier, baron de Catillard. Le rapprochement est fâcheux. Sobre de régime, de sommeil, et d’habit, il aime à étonner les gens. Et je reconnais à ce trait le parvenu. Nous touchons ici au vif de notre Dumas, et nous le dépassons un peu pour entrer au cœur de son temps. Dantès sert sur sa table des mets rares, dont il a soin de vanter la rareté. Il étale quelques prétentions assez plaisantes, notamment celle d’être servi mieux que personne. On se croirait au Marais, et non aux Champs-Élysées. Oriental par ses besoins, il est un bourgeois fieffé par ses exigences. Il fait sonner son yacht, ses cabriolets, et ses voyages. Il achète pour 30 000 francs des chevaux qui en valent 15 000 et les renvoie à Mme Danglars, leur précédente propriétaire, à titre de présent. Eh mais, qu’est-ce donc que ce gentleman ?

Monte-Cristo incarne une des convoitises du