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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/188

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

beaucoup d’heureux. On ne se souvient plus guère, à cette heure, de cette prodigieuse popularité dont les succès éclatèrent en fanfare. On oublie la France entière suspendue aux feuilletons et appréhendant la mort de Porthos comme un deuil public. Le poète Eugène Manuel me disait dans une lettre qui précéda de peu sa mort : « Je suis de la génération qui, chaque jour, attendait impatiemment la suite, la suite au prochain numéro, et je n’en rougis pas. » Le Français qui citait les livres de Dumas n’apprenait rien à l’étranger. Des millions d’hommes y ont puisé à même le charme des belles prouesses et des grandes passions. Avec l’illusion de l’existence chevaleresque ou fantastique ils y ont trouvé semée partout, partout florissante, la belle humeur de notre race. Quel voyageur, égaré en quelque canton de l’univers, a mis la main sans émotion sur un de ces volumes à couverture vert clair, symbole d’allégresse et d’espérance, que le vieux Dumas écrivit pour réjouir les hommes qui peuplent notre planète ? Aujourd’hui encore, il fait prime sur le marché des livres. Si cet argument n’est pas sans réplique, au moins cette vogue persistante n’est pas sans mérite. Où les Trois Mousquetaires et Monte-Cristo n’ont-ils pas porté notre langue ?

Dumas n’a inventé ni le roman populaire ni le roman-feuilleton : le Lion amoureux et les Mémoires du Diable de Frédéric Soulié sont antérieurs aux Trois Mousquetaires ; et, le premier, en 1842, Eugène Sue traitait avec le Siècle pour la publication des Mystères de Paris. Il a toutefois infusé la vie à ce genre pour un long temps. Paul Féval, père