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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/22

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

triomphante et souriante. Le moine cher à son cœur, Dom Modeste Gorenflot, lorsqu’il chante après boire, « fait trembler à droite et à gauche les vitres des maisons » ; et Porthos, l’aimable Porthos, dont il pleura la mort après tant de volumes et d’aventures, est homme à soulever les tours de Notre-Dame : même en dormant, il plaît, maîtrise, étonne par la beauté des biceps. « À ses muscles tendus et sculptés en saillie sur sa face, à ses cheveux collés de sueur, aux énergiques soulèvements de son menton et de ses épaules on ne pouvait refuser une certaine admiration : la force poussée à ce point, c’est presque de la divinité. » Mais si vous êtes curieux de voir cette force en action, cette énergie à l’œuvre ailleurs que dans les théories de Stendhal ou les récits de Marbot, lisez la défense du pont de Brixen par le général, la prise de la poudrière de Soissons par Dumas, l’occupation du bastion Saint-Gervais par les mousquetaires, la conquête d’Adèle par Antony, et toutes les œuvres d’Alexandre Dumas, et toute sa vie.

Le 26 février 1806, le général Alexandre Dumas mourait à quarante ans. Deux années de sa solde étaient impayées ; la maladie avait consumé le peu de ressources qui lui restaient. Il laissait une veuve avec deux enfants, une fille en pension et un fils de quatre ans. En vain Brune, Murat, Augereau, Lannes, Junot s’entremirent-ils auprès de Napoléon ; l’empereur resta sourd aux sollicitations réitérées en faveur de la famille d’un républicain. En sorte qu’Alexandre Dumas, qui connut la gêne dans son enfance, connut aussi la liberté. Il grandit, sauvageon plein de sève, à l’orée des forêts ducales de