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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/24

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

tempérament fut plus impérieux que son cœur ne fut difficile, toutefois il est doux à la femme. Il l’aime moins qu’il ne croit, alors même qu’il pense l’aimer passionnément ; pourtant, il l’aime à sa manière, avec je ne sais quelle fougueuse bonté, très capable d’une intime délicatesse, une fois donnés les rudes assauts à la vertu défaillante. Toutes les femmes qu’il a mises sur la scène ou dans le roman, même les plus perverses, écrasent sur leur paupière, à point nommé, la petite perle inestimable, larme de rédemption. Il en est de sa sensibilité comme de sa foi religieuse : il l’a souvent fourvoyée ou compromise, jamais entièrement perdue. Il est vrai que ni le pouf ni le scandale ne l’effarouchent, et que les contradictions ne l’embarrassent guère. Il y aura dans son existence, comme dans ses amours, quelques ambigus. Il lui arrivera d’aimer avec transport deux Mélanies à la fois, d’être révolutionnaire et ami des princes, républicain et épris du xvie siècle, satanique à la façon de Byron et gai d’une gaîté foncière, qui tient à l’épanouissement de l’organisme et contre laquelle il est désarmé. Maintes fois il invoquera Satan, glorifiera le Doute et montrera le poing à Dieu ; et il écrira d’ailleurs : « Jamais, dans le cours d’une vie déjà assez longue, je n’ai eu, aux heures les plus douloureuses de cette vie, ni une minute de doute ni un instant de désespoir. » C’est qu’au sortir de l’enfance, après la marche et les chasses, il a goûté des lectures à la mode parmi ses contemporains, et que, malgré la prudence maternelle, l’imagination débordante fut plus forte que sensibilité, foi, muscle et tempérament