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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/33

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L’HOMME ET SON TEMPS.

quand il essaiera « de faire pour la France » ce que l’auteur d’Ivanhoe et de Rob Roy « avait fait pour l’Écosse ». Voilà les deux sources où, malgré les dénégations de la critique contemporaine, il n’a cessé de puiser. On l’avait noté sans bienveillance, au lendemain de ses premiers succès ; on l’a trop oublié aujourd’hui. Shakspeare, qu’il proclame son « Dieu », ne fut guère son maître. Il n’a garde d’imiter le monstre lui-même. De Gœthe il n’a emprunté que quelques scènes d émotion et surtout le monologue, tout en action, du duc d’Albe, qu’il utilise dans Henri III et Christine,

C’est bien lui ; son cheval de vitesse redouble,


et en maint autre endroit, comme il refait dix fois la scène de la porte de l’Abbé, à laquelle se heurtent d’abord le duc de Guise et le colonel d’Hervey, porte de cave dans les Trois Mousquetaires, et dans les Quarante-cinq porte Saint-Antoine. Ai-je dit qu’il ne lit point en vain ? S’il a étudié Calderon, comme il l’assure, il n’a pas dû s’y plaire : car il n’en a rien retenu. Schiller et Scott sont ses auteurs.

En 1822, au moment où il s’installait à Paris pour vivre de son écriture en attendant qu’il vécût de sa plume, il ne savait rien ; en 1829, il était muni d’une éducation littéraire qui le mettait de plain-pied avec les passions de son époque. Employé au Palais-Royal, il tournait volontiers ses regards vers la Comédie-Française, comme il seyait alors à un homme qui portait en lui sa révolution littéraire. La collection Ladvocat avait mis à sa portée les chefs-d’œuvre du théâtre étranger ; les