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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/54

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

Éclater en sanglots et se répandre en pleurs ;
Puis enfin je me suis, la tête échevelée,
Jetée à vos genoux et je m’y suis roulée

Si cette scène ne fait pas une beauté moralement égale à celle de Polyeucte, elle n’en est pas moins une des plus fortes et touchantes qu’un dramatiste ait exécutées.

Les critiques pour qui tout se mesure au canon de la tragédie, ont beau jeu à comparer le dénouement de Charles VII avec celui d’Andromaque. Dumas lui-même les y a conviés. Ce qui nous intéresse, c’est à quel point il est différent. Oui, Yaqoub rugit, pensant imiter Oreste ; ils rugissent tous, montés à un certain diapason de fureur. Oui, Bérengère l’enchante et l’ensorcèle, pensant suivre l’exemple d’Hermione. Et je connais qu’elle franchit d’un seul élan, comme une lionne blessée, tous ces obstacles de transitions morales dont je parlais naguère, et qui sont indispensables à faire la lumière dans une âme. Elle n’est point une âme, mais une passion : tendre, mais prompte à agir. Sentant brûler de jalousie tout son être, elle arme sa faiblesse de toute son énergie. Elle est une créature de drame, en chair et en os, plutôt qu’une héroïne. Et l’Arabe au front bronzé subit l’action de la femme blanche. Je défie les esprits les plus prévenus d’entendre au théâtre cette scène dramatique du dénouement, sans passer par les sensations extrêmes de l’amour et de la jalousie, sans éprouver le frisson du désir. Tout ce qu’une créature jeune, belle et presque chaste peut glisser de charme chaud et subtil dans les caresses de la voix, tout ce que les rayons de l’Orient peuvent