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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/148

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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

théâtre les appétits de son imagination[1]. À la vérité, son esthétique n’est que fantasmagorie. Toutes ses idées, ou du moins celles qu’il a faites siennes, se déforment et s’agrandissent démesurément dans le passage du cerveau où elles s’agitent sur le papier où elles se fixent. À mesure qu’il se rapprochera du mélodrame et que ses personnages seront plus inconsistants, la formule qui les définit ou plutôt qui les dilate dans la préface, s’élargira jusqu’au symbole. Que dis-je ? C’est proprement une discorde entre la fantaisie et les nécessités réelles de la composition. Tout ouvrage qu’il a écrit pour le théâtre, resplendit à ses yeux d’une auréole, qui en cache les défaillances. Il est prodigieusement dupe de visions admirables. Et il écrit des avant-propos, qui pourraient être en vers, comme le monologue de don Carlos ; le lyrisme y vaticine, les contradictions n’y sont point voilées. Au moment de mettre en couplets les descriptions de Walter Scott, il les dédaigne dans ses notes[2] ; il proclame le vers indispensable, et il écrit trois mélodrames en prose. Pour prendre ses vues sur les idées, il escalade à tout coup les tours de Notre-Dame, et fait de là-haut ses salutations théâtrales.

Il parle au peuple. Aux grandes foules les grands mots ; et aux grands mots les grands remèdes. Ces symboles ne font pas qu’il ait vu seulement ce qu’il y avait à faire. Le promoteur du drame national débute par Cromwell, du drame historique par Hernani, et pousse jusqu’au drame social avec Angelo. Je sais qu’Angelo[3], c’est « la femme… toute la femme », à

  1. Préface de Cromwell, p. 49.
  2. Théâtre, t. I, p. 513, note 10. « Ce n’est pas non plus en accommodant des romans, fussent-ils de Walter Scott, pour la scène, qu’on fera faire à l’art de grands progrès. »
  3. Préface d’Angelo, p. 267.