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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/223

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DRAMES TRAGIQUES.

Cur non ? Parce que, dramatiste populaire, il met en oeuvre tout ce que l’auteur tragique a écarté. Il suit Corneille à contrepied. Il parle premièrement aux yeux. Il recherche les tableaux : la chasse, le désert, la confession, le jugement, et le reste. Charles VII fait son entrée, avec un faucon sur le poing, et en compagnie d’Agnès Sorel[1]. Traduisez : voici un roi sans énergie, qui s’abîme dans les plaisirs, pendant que la France est en proie à l’Anglais. On nous développera plus tard l’idée dogmatiquement, comme dans les manuels, et en vers, pour forcer notre entendement, qui est court. Ce n’est plus la raison analytique qui domine la pièce, mais l’imagination qui la soutient. On relie entre eux tous les événements qui peuvent d’une idée générale, telle que l’amour de la France féodale, traduire d’abord l’intelligence matérielle, pour ainsi dire, et imposer la perception sensible. Dumas, qui est né pour le théâtre, est doué de la logique nécessaire à contenir ces événements dans les limites d’une certaine unité de conduite. Mais, quoi qu’il dise et quoi qu’il fasse, cette unité et cette logique sont en action dans une pièce d’action ; elles ne sont nullement intérieures, et tiennent surtout au mouvement qui se fait sur la scène ; elles président au jeu visible du panorama, des événements, des péripéties plutôt qu’au jeu secret des caractères et des passions, qui éclatent ici en gestes et en actes, et dont nous n’apercevons que la vie apparente, la douleur physique, et les symptômes évidents. Et c’est bien là le drame, le bon grand drame populaire, qui a raison de cette tragédie à la fin du troisième acte.

Jusque-là les personnages sont, comme la pièce, régis par la fantaisie. C’est elle qui se plaît au con-

  1. Charles VII, II, sc. v, p. 258.