Aller au contenu

Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/300

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
284
LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

dons-nous de le croire, et, au contraire, élevons-nous contre cette prétention. Il se flatte, mais il dénature et rapetisse son œuvre, outre qu’il en fausse la portée.

Le drame historique et le drame moderne sont les deux faces d’une même conception. À l’origine de l’un et de l’autre, deux monologues, celui d’Hamlet et celui de Figaro, l’un qui restitue à la thèse ses droits sur la scène, l’autre d’oîi le théâtre social découle comme d’une source vive. Drame moderne et drame historique répondent aux mêmes aspirations d’une même époque. La peinture des milieux diffère ; mais le procédé de couleur est le même. Une fois trouvé, il était aussi naturel de l’appliquer au xixe qu’au xive ou xvie siècle. C’est affaire de décor et de cadre, et non pas encore de minutieuse observation. L’homme qui avait commencé par Henri III devait écrire Antony. C’est ce que le « feuilleton » explique fort bien, en dépit de ce que l’écrivain en a pu dire ailleurs.

Au reste, la technique y est semblable, porte la même date et marque le même état de l’esprit français. Il demeure entendu que la fantaisie n’y saurait tenir la seconde place : on n’observe pas froidement ; on a des intuitions ; on anime les milieux, les mœurs et les passions actuelles du même style dont on ressuscite le passé. Ici encore, ici surtout, on laisse voir qu’on a lu Hamlet, les Brigands, Werther, Childe-Harold, dont on se fait une personnalité exotique, personnalité d’emprunt, masque fatal, scepticisme violent, Acre dédain des préjugés ; et l’on est toujours le Dumas un peu gascon, un peu naïf (à cet âge du moins), qui s’engoue de nouveautés, s’entête de révolutions, et pense être bien lyrique. Ce lyrisme-là n’est que fard. Lavez-moi cette bonne figure tristement grimée ; et, si lyrisme il y a, vous en découvrirez un autre, autrement dramatique, dans le sens de la tradition de notre théâtre, et