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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/31

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L’HOMME ET SON ÉPOQUE.

durant, il surmena cette colossale musculature, cette imagination ardente, cette sensibilité à la fois exubérante et tendre. Il usa dans le roman, le feuilleton, le journal, la causerie, cette popularité même qui semblait bâtie à chaux et à sable ainsi que l’homme. Après tant d’actes égrenés sur tant de scènes, il fallut attraper le dénoûment. La faveur publique se refroidit ; les forces manquèrent ; la flamme de l’invention s’éteignit ; le sentiment s’hébéta ; et cette vie de travail et de hasards, de triomphes et de puffisme, de passions, de fictions, de visions s’acheva dans l’inconscience. « Un jour, écrivait son fils, la plume lui est tombée des mains, et il s’est mis à dormir[1]. »

Il mourut le 6 décembre 1870, vers la fin de cette année terrible, qui portait, pour un temps, un coup funeste à l’imagination française, déjà fort apaisée depuis le milieu du siècle. La France nouvelle n’était plus aux héros de cape et d’épée, ni au génie d’aventures — chevaleresques, s’entend.


II

L’ÉDUCATION DE SON ESPRIT.

Il sut de bonne heure prendre les oiseaux à la pipée ou à la marette. Il sut aussi tirer un lièvre proprement. Les éléments de la musique, l’escrime et la danse : c’est tout ou presque tout ce qu’il apprit sous le premier Empire, avec très peu d’orthographe et de l’arithmétique moins encore. Ses lectures furent dirigées par le hasard. Après la passée des ragots, ce qu’il lit

  1. Extrait d’une lettre d’Alexandre Dumas fils à M. Alfred Asseline, citée par M. Ch. Glinel, ch. vii, p. 494.