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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/310

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LE DRAME d’ALEXANDRE DUMAS.

et les roses, devient de plus en plus inquiète. Il lui faut des lettres à heure fixe[1], pendant qu’on lui pose des sangsues ; Antony rencontre cette phrase qui ne déparerait pas un vaudeville de Labiche : « Laisse-toi mettre toutes les sangsues qu’on voudra, au nom de notre amour[2]. » Enfin Adèle dessèche, et d’inquiète devient jalouse. Mais est-ce qu’il est jaloux, lui ? Est-ce qu’il n’y a pas des rapprochements prédestinés, des harmonies préétablies qui excluent le soupçon ?… « Notre amour change de nature, sans doute ;… nos sensations sont toujours heureuses[3]. » Et cela même est un mot de la fin. La prédestination pèse désormais à tous les deux.

Dumas ne se récréait plus en l’amour de Mélanie[4].

  1. Lettres inédites. « … Je l’ai écrit avec la plus grande régularité, même quand je ne pouvais pas écrire, même quand une goutte de sueur me tombait à chaque lettre, et que j’étais obligé d’écrire deux fois les mots pour tâcher qu’ils fussent une fois lisibles…  »
  2. Lettres inédites. 30 septembre. (1830 ?) La date de l’année semble résulter de ces mots de la même lettre : « … Tout est autour du roi dans le même état. Je lui ai fait remettre un rapport. Je ne sais pas même s’il l’a lu… On l’aime de jour en jour davantage, et l’on use même de familiarités inconvenantes. M. Dupaty lui a envoyé l’autre jour un billet de garde comme faisant partie de l’arrondissement du Palais-Royal. C’est absurde. » Il s’agit très probablement du rapport sur la Vendée, où Dumas était allé le 10 août 1830, au lendemain de l’avènement de Louis-Philippe. Ce rapport fut remis à Lafayelto qui le fit tenir au roi. Dumas fut reçu en audience au mois d’octobre 1830. Cf. Mes mémoires, t. VII ch. clxxiii, p. 150 et p. 155.
  3. Lettres inédites. « … Et ne va pas croire que c’est par amour-propre que je crois à ta fidélité. Non, attirés l’un vers l’autre, comme ; nous l’avons été, il me semble qu’une force étrangère pourra seule nous séparer, et non l’effet de notre volonté. Notre amour change de nature sans doute. Nos sensations sont autres, mais notre amour est toujours notre vie. Nos sensations sont toujours heureuses. »
  4. Il ne s’agit pas ici de fouiller la vie intime de Dumas. Cet indiscret reportage à distance est une misère de notre temps. Mais pour être édifié sur la sincérité du lyrisme dans Antony, il