Aller au contenu

Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
322
LE DRAME d’ALEXANDRE DUMAS.

sa part, pour lui opposer les conditions, illusions, aspirations, obligations de la société. La scène du Hasard est comme un écho de la légende napoléonienne ; celle des Enfants trouvés met sur le théâtre les préventions et préjugés de l’aristocratie nouvelle, et la levée de boucliers de tous les Figaros impatients ou avides. S’il y a du byronisme là-dessous, on voit du moins se dresser le mur d’airain de l’opinion, obstacle alors inéluctable aux amours en marge et aux appétits en liesse. Dans le manuscrit, où la passion parle à peu près seule, Adèle, presque reconquise, pardonne à Antony et déteste vaguement le monde[1] ; dans la pièce, éperdue, elle se révolte contre la société, mais, chancelante, lui obéit. Le moment approche de l’irréparable rébellion.

Acte III. — Peu de retouches. C’est le centre du drame, un attentat dont la rapidité exige plus de décision que de préparation. Dumas a cru devoir ajouter le jeu de scène du poignard qu’Antony fiche en la table, et cette phrase lapidaire : « Elle est bonne, la lame de ce poignard »[2]. Le monologue, dont cette phrase est un fragment, s’égarait en des considérations quelconques sur la destinée. Une apologie métaphysique du suicide en a pris la place ; ce bavardage était fort à la mode, et amorçait le dénoûment. Le morceau se terminait à l’arrivée de la voiture, sur quelques mots d’angoisse empruntés au monologue du duc d’Albe, et déjà utilisés dans Christine[3]. Il a supprimé ces beautés déjà vues. Une scène a disparu, dans laquelle l’hôtesse disait à Adèle que le baron d’Hervey passait à Stras-

  1. Manuscrit original, II, p. 20. « Je vous pardonne, Antony… Oui, oui, je vous pardonne ; car il faut que vous soyez bien malheureux pour vous oublier ainsi. » Cf. p. 321.
  2. Antony, III, sc. iii, p. 196. C’est une préparation, pour les yeux, du meurtre final.
  3. Voir plus haut, p. 89.