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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/425

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DUMAS PÈRE ET DUMAS FILS.

toujours été ; assez au moins pour épouser sa femme : elle-même en convient[1]. Il n’a pas de génie, il est même un peu sot (l’observation ne perd pas ses droits) ; mais il y supplée par tout ce qui peut y suppléer en ces affaires : l’ardeur et la vigueur. L’autre, le nabab, l’amant magnilique est encore plus frénétique en dedans. C’est Antony et Dantès fondus ensemble. Antony casse les vitres ; Nourvady les remet à neuf. Il a une manière à lui de sauver la vie à une femme et de la déshonorer, que sa fortune lui permet, et dont la fantaisie a quelque chose de l’héroïsme. Il est plus positif, sachant attendre son heure. Il règle les créanciers, comme il arrêterait l’attelage emporté. Il le dit, et il y faut souscrire. « Si je vous avais vue, emportée par votre cheval, vous aurais-je demandé la permission de vous porter secours ? Je me serais jeté à la tête de votre cheval et je vous aurais sauvée, ou il m’aurait passé sur le corps. Si je vous avais sauvé la vie et que j’eusse survécu, vous m’auriez peut-être aimé pour cet acte héroïque[2].  » Il a encore de bonnes paroles, sous lesquelles frémissent les désirs dont pâtit Adèle : « Est-ce bien une femme de votre supériorité qui parle des convenances du monde ? Les femmes comme vous ne sont-elles pas au-dessus de tout cela ? Non, vous le savez bien, les convenances et la dignité ne sont plus rien, quand la passion ou la nécessité commande[3]. » Et puis, comme Antony, cet amant est animé d’une passion tenace jusqu’après la mort. Pour s’assurer l’amour de sa maîtresse dans l’éternité, l’un la poignarde, l’autre lui lègue sa fortune[4]. Ici Dumas fils se retrouve, logique et sensible. Nourvady baise les bras nus de Lionnette,

  1. La Princesse de Bagdad, I. sc. ii, p. 25.
  2. Ibid., II, sc. ii, p. 47.
  3. Ibid., p. 49.
  4. Ibid., p. 55.