Aller au contenu

Page:Paris - François Villon, 1901.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
LA VIE.

était très partagée; quant à la petite bourgeoisie et au peuple, ils tenaient pour le roi français, ils aimaient la fille héroïque qui avait commencé la libération de la France et essayé de reprendre Paris, et quand, trente ans après, le poète parisien versait une larme sur

la bonne Lorraine,
Qu’Anglois bruslerent a Rouen,


il exprimait les sentiments au milieu desquels il avait grandi. Au reste la domination étrangère ne devait plus guère se prolonger : en 1436 les Anglais quittaient Paris pour toujours, et Charles VII y entrait l’année suivante.

Nous ne savons quel métier exerçait le père de notre poète. Il mourut jeune, et ne parait pas avoir laissé d’autres enfants que François : du moins celui-ci ne parle-t-il jamais de frères ou de sœurs. Sa mère, restée seule avec ce fils, se consacra à lui tout entière. Si plus tard il la fit cruellement souffrir par ses écarts et par ses malheurs, il l’aima tendrement à son tour. Il parle d’elle avec une émotion à laquelle se mêle le remords : ma pauvre mère, dit-il,

Qui pour moi eut douleur amere,
Dieu le set, et mainte tristesse!


Il la peint en deux traits, « pauvrette et ancienne », ne sachant rien, n’ayant jamais lu lettre, n’ayant pour se soutenir dans sa dure vie que son amour pour son fils et sa dévotion à Notre-Dame. Elle vivait encore en 1461 : voilà tout ce que nous savons d’elle.