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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/181

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L’UNION TOLSTOÏ

tion que son cousin, qu’il rejoignit dans l’antichambre :

— « J’ai à te parler, » lui dit-il, en lui saisissant le bras d’un geste brusque, duquel l’ouvrier se dégagea en lui répondant :

— « Et moi, j’ai à rentrer. Si tu veux que nous causions, tu n’as qu’à m’accompagner. La rue est à tout le monde. Mais, à bas les pattes. »

Une seconde, les deux cousins se tinrent debout l’un en face de l’autre, et les yeux dans les yeux. Quelqu’un arrivait. Ils se séparèrent, sous le prétexte de chercher leur chapeau et leur pardessus, puis descendirent l’escalier sans échanger un mot. Une fois sur le trottoir de la rue du Faubourg-Saint-Jacques, et bien sûr que personne ne pouvait plus ni les entendre ni les interrompre, Jean commença :

— « Tu sais que tu t’es conduit d’une manière abominable vis-à-vis de Crémieu-Dax ? »

— « Tu sais, » répliqua Riouffol, « que vous vous êtes conduits tous quatre, vous les bourgeois, d’une manière abominable vis-à-vis de l’U. T. ? »

— « Il ne s’agit pas de l’U. T., » reprit Jean. « Il s’agit de l’insulte que tu n’as pas craint de jeter à la face de celui d’entre nous que vous devriez le plus respecter, vous les ouvriers. »

— « Je ne respecte pas les traîtres, » dit Riouffol, avec une extrême violence. « Oui, les traîtres ! C’est lui qui a fait le coup, j’en suis sûr, et qui a conseillé à Chanut de demander à parler