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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/298

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L’ÉTAPE

d’hui, d’autres conséquences que de nous faire travailler un peu plus, pendant deux ou trois ans, toi et moi… L’incident est clos. Encore un coup, je te défends d’y revenir… »

— « C’est ton dernier mot ? » dit Jean après un silence.

— « C’est mon dernier mot, » répliqua Julie.

— « Alors, !» reprit-il, « c’est à Rumesnil lui-même que j’irai demander une explication sur vos rapports. Ses assiduités auprès de toi ont été remarquées. On en parle. Je le sais. Elles ne continueront pas. Et d’abord, je le prierai de cesser ses visites. »

— « Et s’il me plaît à moi de les recevoir ? » répondit la jeune fille. « Je te trouve étonnant ! Est-ce que tu es le maître ici ? Est-ce que j’habite chez toi, par hasard ? Il n’y a qu’une personne qui ait le droit d’interdire la porte à quelqu’un dans la maison : c’est mon père. Ou bien préviens-le, ou bien ne te mêle pas de ce qui ne regarde que moi et mes convenances !… »

— « Le prévenir ? » s’écria Jean. « Tu sais trop bien toi-même que c’est impossible, toi qui m’adjurais, tout à l’heure encore, de respecter son repos !… »

— « Attends alors que je sois sur le point de le troubler, » répliqua-t-elle, et, amèrement : « De nous deux, ce n’est peut-être pas moi qui lui prépare le plus grand chagrin. »

— « Qui donc alors ?… » demanda Jean. Quand Antoine lui avait fait la veille une allusion à ses sentiments secrets pour Brigitte Ferrand, dans des