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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/306

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L’ÉTAPE

que voilà le point de départ de nos rhétoriciens. Au lieu que nous, on nous donnait à traiter l’ÉLoge du prince Jérôme, Hieronymi principis laus ! Mais oui ! J’étais en quatrième, quand les valets de l’Homme de Décembre ont osé insulter à la jeunesse en dictant au Concours général cette matière de vers latins. Ils n’en ont pas été les bons marchands… Les stances vengeresses de Richard sont venues jusqu’à Tournon :

Vous ne comprenez pas que nos veilles muettes
Ont de chacun de nous fait un républicain ;
Que nous supportons mal nos fers ; que nos poètes,
Ce sont les Juvénal, les Hugo, les Lucain…

Quel malheur que celui-là soit mort à vingt ans ! Quel malheur ! Tu te rappelles, la maman, » il s’adressait à sa femme maintenant, « ce sont les vers que j’ai récités chez vous à la première soirée où vous m’avez invité… »

Et il se remit à corriger le devoir de Ravenel, qui lui avait remémoré une des idoles de sa liturgie intime, ce Jacques Richard, lequel eut son heure de célébrité pour avoir bafoué en une pièce satirique, assez médiocrement imitée des Châtiments, « l’Oncle du tyran ! » au lieu du panégyrique proposé comme thème aux jeunes lycéens de 1860. Ce n’était pas une fois ; c’était trente, que l’universitaire avait récité à ses fils ce plat morceau, toujours avec la même incorrigible admiration. Son goût, et il l’avait exquis, n’arrivait pas à dissiper le prestige dont cette rimaillerie res-