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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/368

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L’ÉTAPE

n’avoir pas suivi mon conseil, j’en suis sûr, et de ne pas s’être défié de ce prêtre. Homme noir, d’où sortez-vous ?… Déranger avait raison. Mais sois tranquille, la maman, Julie et Jean ont le cœur à sa place, et ils ont de qui tenir… »

Le père ne croyait pas dire si juste. Certes, ils avaient de qui tenir, les pauvres enfants, mais dans un tout autre sens que ne l’entendait son inguérissable optimisme… Julie s’était précipitée à la suite de son frère jusque dans sa chambre, et là, brusquement, impérieusement, elle lui avait dit :

— « Que se passe-t-il avec Rumesnil ? Je veux le savoir. J’en ai le droit. Oui ! Je t’avais supplié de ne pas te mêler de mes affaires. Tu t’en es mêlé. Je l’ai vu dans tes yeux quand tu as reçu ce billet. J’ai le droit de savoir ce que tu as fait, puisqu’il s’agit de moi… »

— « Tu as donc la conscience bien troublée, Julie ?… » répondit le frère. « Voilà cinq jours que tu ne me connais plus, parce que je me suis permis une observation sur un certain sujet, et maintenant, c’est toi qui provoque cet entretien, toi-même, remarque-le… D’ailleurs, je n’ai rien à te cacher… Ce que j’ai fait, tu le sauras par ce billet. Lis-le… »

Il lui tendit la lettre de Rumesnil. Elle était ainsi conçue : « Mon cher Jean, je trouve ton mot en revenant de la campagne. Je déjeune dehors demain mercredi, et j’ai quelques courses à faire, dont une à