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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/508

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L’ÉTAPE

chaste et qui ont beaucoup respecté les femmes, un sens exquis de la jeune fille, de sa grâce et de sa poésie. Comment celui-ci n’eût-il pas été remué jusqu’à l’âme par l’idée que cet adorable visage était celui dont s’enchantait le premier amour de son fils ? Ce mélange d’aversion et d’attendrissement frémissait dans l’accent qu’il eut pour dire une phrase bien banale. Mais dans les situations comme celle où se trouvaient ces deux êtres vis-à-vis l’un de l’autre, même les formules convenues de politesse se chargent, par la seule situation, de sympathie ou d’antipathie :

— « Si vous le permettez alors, mademoiselle, j’attendrai… Je vous ai interrompue et je vous prie de ne pas tenir compte de ma présence… »

— « Mon travail n’est pas bien pressé, » dit Brigitte ; « j’étais en train de transcrire quelques pages pour mon père… »

— « Vous lui servez de secrétaire ?… » demanda Joseph Monneron.

— « De copiste, simplement,  » rectifia-t-elle.

— « Est-ce que Ferrand prépare un nouveau livre ? » interrogea-t-il.

— « Un livre ?… Non, c’est la seconde partie de son étude sur le cardinal Newman qui a commencé le mois dernier dans… » Et elle nomma un des périodiques les plus connus parmi ceux qui ont eu, durant ces dernières crises, le courage de défendre la cause sacrée de la conservation sociale en face de la sauvagerie des révolution-