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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/512

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L’ÉTAPE

Tu reçois mon fils Jean. Il est sans cesse chez toi… As-tu remarqué qu’il s’intéresse à ta fille ?… »

— « Il l’aime, » répondit Ferrand, après une seconde d’hésitation causée par la surprise. « Je le sais. »

— « Et tu sais qu’elle l’aime ? » demanda Joseph Monneron.

— « Oui, » reprit Ferrand, « et ton fils le sait aussi. C’est moi-même qui ai cru devoir le lui apprendre quand il est venu la demander en mariage… »

— « Il te l’a demandée en mariage, » s’écria Monneron, « et tu l’as laissé faire une pareille démarche ?… Et tu ne lui as pas dit qu’il aurait dû m’en parler d’abord ?… Et il n’a pas eu de lui-même ce besoin de se confier à moi, » gémit-il douloureusement, « de me traiter comme son ami, son meilleur ami ?… Ah ! Il ne m’aime donc pas !… »

— « Ne dis pas cela, » interrompit l’autre vivement ; « ne le pense pas, Monneron… Jamais il ne t’a donné une preuve d’affection plus grande… Il a reculé devant la cruauté de mettre ton cœur à une certaine épreuve… Je ne t’en aurais jamais parlé… Mais tu as raison, je te dois d’être entièrement, complètement sincère avec toi… Tu connais mes idées, » continua-t-il, après une nouvelle hésitation. « Elles sont celles de Brigitte. Le mariage, pour nous, n’est pas seulement un contrat social ; c’est un sacrement. J’ai répondu à Jean que je ne donnerais ma fille qu’à un catholique pratiquant… Il connaissait tes principes. Il