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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/140

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MON BERCEAU

gens, et comme on comprend bien que les réactionnaires d’aujourd’hui regrettent ces époques bénies !

On comptait, dans cette nuit mémorable, sur la petite place et aux abords du Louvre, plus de trois cents cadavres, ce qui n’empêchait pas, au matin, les gens du roi et les âmes bien pensantes d’avoir encore soif du sang des mécréants ; ces aimables créatures pensaient que la leçon n’était pas suffisamment sérieuse.

258 ans plus tard, en 1830, pendant les trois glorieuses, la fusillade couche de nouveau sur la place Saint-Germain-l’Auxerrois les citoyens qui ont commis le crime impardonnable de vouloir échapper aux griffes des Bourbons.

On enterra les morts devant la colonnade du Louvre, à la place du jardin actuel, jusqu’au moment où on les porta sous la colonne de Juillet, sur la place de la Bastille.

« Paris était sanglant et libre : pour ses frères
Le peuple improvisait des couches funéraires,
On respirait partout une odeur d’abattoir,
Parfum que la victoire évapore le soir.
Le vieux Louvre baignait ses pieds dans le carnage ;
La tour de l’Auxerrois, cloître du Moyen-Age,
Où Charles IX venait oublier ses remords,
Sur ce tableau de deuil versait le glas des morts,
Chose étonnante à voir ! à Paris ! à cette heure