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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/83

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LA COUR DES FONTAINES

s’en vont, hélas ! souvent la mine déconfite, leurs manuscrits sous le bras, lorsque le trio qui remplace Dentu les a éconduits, ce qui est fréquent, je vous jure, surtout aujourd’hui que la librairie est dans le marasme.

Cependant, il y a là encore de bonnes têtes de gens de lettres qui défilent et sont curieuses à étudier au passage, à retenir…

J’oubliais l’honorable corporation des allumeurs de becs de gaz du quartier qui, le soir, entre chien, et loup, se rassemblent au pied de la borne-fontaine qui est dans un coin de la place, entre le glacier et Dentu : lumières de l’esprit et lumières des yeux, en vérité, les habitants de la Cour des Fontaines n’ont pas à se plaindre.

Je ne serais pas complet si je ne rappelais que la Cour des Fontaines fut longtemps fréquentée par des saltimbanques sérieux, dont le plus célèbre fut, à coup sûr, Fanfan le Bâtonniste ; il faisait asseoir devant lui sa femme sur un tabouret, lui plaçait une pièce de six liards sur le nez et, dans un moulinet furieux, il enlevait la pièce sans endommager le nez de sa fidèle épouse ; la foule frémissait d émotion, applaudissait à tout rompre et les gros sous pleuvaient sur le tapis usé qui était aux pieds de ce couple intéressant… pardon,