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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/82

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MON BERCEAU

lugubres, tenues par des gens complètement moisis eux-mêmes. Ça sent le mucre ou le ramucri, comme disent les Normands.

Pendant longtemps un café servait de lieu de rendez-vous aux sourds et muets de Paris qui s’y livraient à des conversations vives et animées, mais absolument silencieuses : à cette époque on ne leur avait pas encore appris à parler, comme aujourd’hui. Les sourds et muets furent remplacés sous le second empire par la pire des bohèmes littéraires, les précurseurs des décadents et des symbolistes et qui, certes, étaient aussi abrutis ; ils n’avaient qu’une excuse peut-être, c’est qu’ils étaient encore de meilleure foi.

Aujourd’hui, depuis la mort d’Édouard Dentu, sa grande maison d’édition, comme je le dis ailleurs, a été transportée dans la Cour des Fontaines par sa veuve, qui n’a pas voulu l’éloigner du Palais-Royal, ni abandonner une tradition plus que séculaire, qui avait porté bonheur si longtemps à son beau-père et à son mari.

On traverse la Cour des Fontaines, on ne s’y arrête pas, si ce n’est pour boire un verre de bière parfois au café du coin, aussi la maison Dentu seule, dans le jour, provoque un peu d’animation, avec le va et vient des auteurs qui