Aller au contenu

Page:Paul de Musset - Course en voiturin, Italie et Sicile, 1845, 2.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 245 —

la cour, les faux dévots, les médecins et les précieuses s’en sont aperçus. Certes, il y a loin d’Aristophane et de Molière au Vénitien Gozzi ; mais la liste des comiques satiristes est tellement bornée, que le nom de Gozzi arrive bientôt après ces deux grands noms, ce qui prouve que la comédie n’a pas eu souvent son franc-parler. Avec son esprit ironique, ses locutions vigoureuses, cet emporte-pièce que la nature lui avait mis au bout de la langue, son cœur naïf et bon, son caractère taciturne, signe distinctif du génie comique, Gozzi n’eût pas demandé mieux que de jouer sur le théâtre San-Samuel les doges, le conseil des dix, l’inquisition politique, et tous les traficants orgueilleux du livre d’or ; une petite difficulté l’a retenu, c’est qu’au premier mot un peu hasardé, on l’eût étranglé à soixante pieds au-dessous du sol, ou donné en pâture aux zanzares des plombs du palais ducal. On ne lui abandonnait que deux ennemis, le mauvais goût de la littérature et le débordement des mœurs. Il abattit le premier ; quant au se-