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Page:Paul de Musset - Course en voiturin, Italie et Sicile, 1845, 2.djvu/288

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C’était une manière de s’introduire en traître dans le camp ennemi. À peine eut-il assuré son crédit sur le public de Venise qu’il abandonna la troupe de Sacchi pour celle du théâtre Sant’Angelo, où l’on jouait des traductions. Il prit l’engagement de faire représenter seize pièces nouvelles dans un hiver, et il tint parole en imitant à la hâte tout ce qui paraissait en France. Il passa du genre bouffon à la comédie prétentieuse de Destouches, puis au drame larmoyant, qui devenait à la mode à Paris, et il crut avoir sauvé et régénéré le théâtre. L’abbé Chiari, écrivain ampoulé, traduisait aussi de son côté les pièces françaises en phébus ultramontain, si bien qu’en peu de temps la comédie nationale disparut, et que la troupe de Sacchi sortit de Venise pour aller chercher fortune en Portugal.

L’académie des Granelleschi ne savait trop que penser de cette révolution subite. Trompée par le titre de régulière qu’on donnait à la comédie nouvelle, et par l’autorité du nom de Molière dont on abusait adroitement, elle hé-