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Page:Pelletier - La Femme en lutte pour ses droits, 1908.djvu/14

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la femme en lutte pour ses droits

elle doit se faire directement la servante de son frère, cirer ses chaussures, brosser ses habits, etc.

Au cours des conversations familiales, on peut dire que constamment, soit d’une manière directe, soit à propos d’autre chose, il est question des rapports sociaux des deux sexes et de la valeur respective de chacun ; la petite fille entend donc, dès qu’elle commence à s’intéresser aux idées, ravaler la femme au rang d’être inférieur. Dans les classes éclairées, il est vrai, le souci de ne pas humilier fait parfois voiler un peu sous ce rapport les sentiments réels ; mais chez les ouvriers et les paysans la brutalité et l’orgueil mâles ainsi que la servilité féminine se donnent libre carrière : « Tais-toi, tu raisonnes comme une femme », enjoint l’époux à son épouse. « Les paroles sont des femelles, les écrits sont des mâles », dit un proverbe populaire.

Aussi, dès qu’il a six ou sept ans, le jeune garçon est-il déjà convaincu de la supériorité de son sexe. « Les femmes, me disait un petit paysan de cet âge, cela ne sert à rien ; ce sont les hommes qui gagnent l’argent. » À la sortie des écoles primaires, le plus grand bonheur des écoliers est d’injurier et de frapper les écolières de l’institution voisine : « sales quil-