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Page:Perey - Histoire d'une grande dame au XVIIIe siècle, La princesse Hélène de Ligne, 1888.djvu/296

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LA FRINCESSE CH. DE LIGNE.

À la suite d’une causerie pendant laquelle le roi avait parlé sans désemparer pendant près d’une heure, le prince, qui trouvait son rôle d’écouteur un peu monotone, saisit au vol le nom de Virgile :

— Quel grand poète, Sire, mais quel mauvais jardinier !

— À qui le dites-vous ! N’ai-je pas voulu planter, semer, labourer, piocher, les Géorgiques à la main ! « Mais, Monsieur, me disait le jardinier, qui ne me connaissait pas, vous êtes une bête, et votre livre aussi, ce n’est pas ainsi qu’on travaille. » Ah ! mon Dieu ! quel climat ! croiriez-vous que Dieu et le soleil me refusent tout ? Voyez mes pauvres orangers, mes oliviers, mes citronniers, tout cela meurt de faim.

» — Il n’y a donc que les lauriers qui poussent chez vous, Sire, à ce qu’il me semble ?

» Le roi me fit une mine charmante, et, pour détourner la fadeur par une bêtise, j’ajoutai bien vite : « Et puis, Sire, il y a trop de grenadiers dans ce pays-ci, cela mange tout. » Et le roi se mit à rire, parce qu’il n’y a que les bêtises qui fassent rire. »