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Page:Perey - Histoire d'une grande dame au XVIIIe siècle, La princesse Hélène de Ligne, 1888.djvu/352

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LA FRINCESSE CH. DE LIGNE.

tares ne viennent pas ici mettre tout à feu et à sang. Dieu m’a sauvé (je ne l’oublierai point), il a permis que je ramasse ce qu’il y a de troupes derrière le Bog. C’est un miracle que j’aie conservé jusqu’ici autant de pays.

» — Où sont donc les Tartares ? lui dis-je.

» — Mais partout, me répondit-il, et parmi eux il y a un séraskier[1] avec beaucoup de Turcs du côté d’Ackermann, douze mille dans Bender, le Dniester gardé, et six mille dans Choczim. »

Il n’y avait pas un mot de vrai dans tout cela. Cinq mois s’écoulèrent dans cette inaction inexplicable, si elle n’eût été voulue. Le prince de Ligne ne tarda pas à s’en apercevoir, et en avertit exactement l’empereur d’Autriche.

Pendant ces longues journées de far niente, le prince s’amusait à griffonner ses pensées sur de petits carrés de papier et, tout en ayant l’air de n’y attacher nulle importance, il avait soin pourtant de les conserver. Ils en valaient la peine à en juger par celui-ci :

— « L’Europe est si bien barbouillée dans ce moment-ci, que c’est, je crois, le temps de réfléchir sur son compte. La France écrit ; malheureuse-

  1. Séraskier, général en chef de l’armée turque.