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Page:Perey - Histoire d'une grande dame au XVIIIe siècle, La princesse Hélène de Ligne, 1888.djvu/365

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LA PRINCESSE CH. DE LIGNE.

» Voici ce que j’ai fait de mieux, c’est de partir de chez ce persifleur, complimenteur, mon admirateur, dit-il, pour Kaminiecz. Ah ! si j’avais encore un cœur, comme je serais amoureux ! La gouvernante[1], cette superbe Grecque, connue et admirée de toute la terre, m’a mené en berline jusqu’à demi-portée de canon de Choczim d’où l’on a tiré quelques coups par-dessus nos têtes.

« Je vous avoue que j’avais plus envie de reconnaître et de trouver son faible pour l’attaque que celui de la forteresse.

» Je loge chez elle, mais quel sabbat d’enfer ! Un bruit de chaînes toute la nuit ; j’ai cru que

  1. La célèbre Sophie de Witt, était une esclave grecque volée à l’île de Chio. Elle fut remarquée dans une rue de Constantinople par l’ambassadeur de France qui la fit recueillir et la fit élever. L’ambassadeur, se rendant à Pelersbourg, s’arrêta à Kaminiecz, il emmenait Sophie avec lui. Le général de Witt, gouverneur de Bessarabie, reçut l’ambassadeur, et, frappé de la beauté de l’esclave grecque en devint éperdument amoureux. Pour tromper la surveillance de son hôte, il arrangea une partie de chasse forL éloignée de la forteresse et il prétexta, au moment du départ, des ordres imprévus qui l’obligeaient à rester. À peine l’ambassadeur se fut-il éloigné que Wilt fit fermer les portes de la ville et célébrer son mariage avec Sophie. Le soir au retour, l’ambassadeur fui fort étonné de trouver les portes closes, on lui envoya un parlementaire qui lui apprit ce qui venait de se passer ; il jugea inutile de réclamer contre un fait accompli et prit philosophiquement son parti du mariage de sa pupille.