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Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/58

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LES ÉGAREMENTS


dans sa peau. Certain couplet à boire vint le plus mal à propos du monde ; l’assiette, les verres et le vin se trouvèrent en un instant renversés sur les genoux de ma tante, qui n’en devint que plus comique ; de sorte que les Mirlitons se trouvèrent arrosés d’une copieuse libation, ce qui ne manqua pas de dérouter les accords. M. Poupard, qui n’aimait pas les plaisirs interrompus, lui ordonna sérieusement de se retirer : on travailla à remarier les voix, et l’on se remit à chanter comme auparavant. On a raison de dire qu’il n’y a que la première fois qui coûte ; nos vieilles ne se firent pas prier, elles achevèrent leurs couplets et reçurent mille compliments de M. Poupard, qui trouva leurs Mirlitons impayables. J’avais assurément tout à espérer d’un homme qui mettait à si haut prix la voix de ma tante. Mon tour vint, et après les petites cérémonies ordinaires, je chantai le Rossignol d’Hyppolite et Aricie, qui ne put jamais balancer le charivari de nos vieilles. Ce morceau, qu’on m’a toujours flattée de rendre passablement, ne m’attira qu’une partie de son attention, sans surprise : il semblait qu’il eût entièrement livré son admiration à la Château-Neuf et à la Daigremont, pour la refuser à toute autre chose. C’est drôle, me dit-il à la fin de mon air : c’est gentil ; mais… mais ce n’est pas de la force