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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/176

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SUR DU GUESCLIN.

dant à ses domestiques de prendre plus avec luy des airs de privauté qui ne s’accommodoient pas avec le respect qu’ils devoient au fils de leur maîtresse.

Cette première estime qu’elle eut pour son fils, ne fut pas de longue durée ; car quand il eut atteint l’âge de neuf ans, elle eut beaucoup de peine à contenir cette humeur bouillante qui le mettoit aux mains avec tout le monde. Il se déroboit souvent de la maison sans prendre congé d’elle, et se faisoit un plaisir d’assembler auprès de luy tous les enfans de son âge qu’il rencontroit, pour se battre contre eux, prêtant le colet à tous ceux qui vouloient mesurer leurs forces avec luy, jettant les uns par terre et s’éprouvant tout seul contre plusieurs, et sortant toujours avec avantage de tous ces petits combats qu’il donnoit, si bien qu’il étoit redouté de tous les enfans de son voisinage ; et l’on voyoit déjà par avance des preliminaires certains de ce qu’il devoit devenir un jour. Il se battoit avec tant d’acharnement qu’il sortoit quelquefois de la mêlée la bouche et le nez tout en sang ; ses habits étoient tout déchirez des coups qu’il recevoit, ce qu’il s’attiroit pour ne vouloir jamais lâcher prise ; et quand il revenoit à la maison tout meurtry des gourmades qu’on luy donnoit, sa mère, le voyant ainsi défiguré, luy reprochoit cette basse inclination qu’il avoit à se mêler avec de petits païsans, ne frequentant que de la canaille et ne se plaisant qu’à se battre avec des gueux, sans se souvenir de la noblesse de son extraction, ny de ce qu’avoit prédit la Juifve en sa faveur, qui témoignoit n’avoir pas rencontré juste sur son chapitre, puisque, bien loin de soûtenir en gentilhomme tout ce qu’elle s’étoit promise de sa conduite, il s’en éloignoit tout à