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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/225

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ANCIENS MÉMOIRES

dégainèrent leurs épées et se chamaillèrent longtemps y sans pouvoir se percer. Il arriva que l’Anglois, après avoir fait les derniers efforts, laissa tomber la sienne. Bertrand voulant profiter de la disgrâce de son ennemy, prit le large pour caracoler, et fit tant de tours et de détours pour amuser Thomas de Cantorbie, qu’il eût le loisir de descendre de son cheval et de se saisir de l’épée de l’Anglois qu’il ramassa par terre, et la jetta de toute sa force hors du champ du combat, afin de triompher plus à son aise d’un ennemy tout à fait désarmé.

Celuy-cy se trouvant hors d’œuvre, après avoir perdu son épée, couroit tout autour de la barrière pour éluder les approches de Bertrand, qui ne pouvoit courir, parce qu’il avoit les genoux armez. Il eut la présence d’esprit de s’asseoir à terre pour détacher l’armure dont sa jambe étoit embarrassée pour pouvoir marcher ou courir avec une liberté toute entière. L’Anglois, le voyant en cet état, revint à toute jambe sur luy pour luy passer sur le ventre avec son cheval, mais Bertrand, qui se tenoit toûjours sur ses gardes, para ce coup en perçant de son épée le flanc du cheval de son ennemy. L’animal se tentant blessé, la douleur le fit cabrer et regimber aussitôt avec tant de secousse et de violence, qu’il tomba par terre avec son écuyer. Bertrand, sans perdre de temps se jetta sur luy, se contentant seulement de le balaffrer, et pour luy faire porter de ses marques, il luy donna quelques coups du trenchant de son épée sur le nez, et tant de gourmades de son gantelet de fer, que Thomas étoit tout en sang, qui couloit sur ses yeux et sur son visage avec tant d’abondance, qu’il ne pou-