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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/224

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SUR DU GUESCLIN.

vilenie n’échappera jusqu’à tant que son tort luy ay montré, où il me détruira ce voyant la baronnie. Mais pour ne pas tout à fait rebuter ces seigneurs qui s’interessoient pour la paix, il leur promit d’y donner les mains, pourveu que Thomas de Cantorbie luy rendît publiquement son épée, tenant la pointe à guise de pommeau, luy disant qu’il se mettoit à sa discretion. Robert Knole luy répondit que la condition étoit trop inique, et qu’il ne conseilleroit jamais à Thomas de commettre une si grande lâcheté.

Les Anglois qui se trouvèrent présens à toute cette cérémonie, ne pouvoient assez admirer l’intrépide résolution de Bertrand, et conjurèrent Thomas de ne se point décourager, et de tenter hardiment le sort du combat, pour soûtenir l’honneur de leur nation, qui seroit extrêmement fletry par sa crainte et par sa défaite. Le chevalier, cherchant du courage dans son desespoir, les assura qu’il étoit résolu de vendre chèrement sa vie, les priant que, s’il avoit l’avantage sur Bertrand, ils ne l’empêchassent point, par une fausse indulgence, de lui donner le coup de la mort, et qu’au contraire, s’il étoit terrassé par son ennemy, ils courussent aussitôt pour engager Bertrand à ne pas achever sa victoire aux dépens de sa vie. Ces Anglois luy promirent qu’en ce cas ils feroient de leur mieux pour le tirer d’affaire. Les deux chevaliers ouvrirent donc la carriere, et se choquèrent l’un l’autre avec tant de furie le sabre à la main, que la force redoublée des coups qu’ils se donnoient fit voler en l’air des éclats d’acier tout entiers, sans que ny l’un ny l’autre en perdissent les étriers. Cette première charge s’étant fuite avec un succès égal, ils