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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/263

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ANCIENS MÉMOIRES

tant de conquêtes en France, en faveur du roy d’Angleterre, son maître, qu’il ne laisseroit à Charles qu’un vain titre de souverain, sans villes et sans sujets.

Il marchoit avec une fierté toute extraordinaire, ayant avec soy les plus braves et les plus aguerris de sa nation. Bertrand avoit déjà passé la rivière d’Evre, et s’étoit posté tout auprès de Cocherel (petit hameau devenu fameux par la celebre victoire que Guesclin remporta prés de ses murailles) : il attendit là des nouvelles de ses espions et de ses coureurs, qui, se rendans auprès de luy, ne luy donnèrent pas plus de satisfaction que la première fois, luy disans qu’ils avoient fait toutes les recherches possibles pour apprendre des nouvelles de la marche du general anglois, et qu’ils n’en avoient pû faire aucune découverte. Bertrand[1] leur reprocha leur peu de vigilance et d’adresse, les accusant de craindre les ennemis, et les traitant de lâches et de gens plus capables de piller la campagne, que de faire aucune action digne d’honneur et de recompense. Il ajoûta que s’il avoit eu cet ordre, il s’en seroit mieux aquité qu’eux, et qu’il falloit absolument que les Anglois ne fussent pas loin d’eux ; qu’il étoit donc dans la résolution de ne pas décamper de là, qu’il n’en eût des nouvelles certaines, parce qu’il étoit bien

  1. « Adonc, dist Berlran : je ne sçay que dire, mais se j’eusse couru, je ne double point que je n’eusse trouve le captal et ses gens. Mais je croy que vous doublez les Engloiz. Vous sçauriez mieulx trouver une grant huche, ou un coffre bien rempli, pour piller les joyaulx qui dedens seroient, qui vostres ne sont pas, que de trouver les Engloiz. Car je oseroie bien jurer pour vray, que ilz ne sont pas loing decy ; ne me partiray, si en auray nouvelles. Car vecy le chemin qui doit aler envers nos adversaires. » Et il disoit vérité. (Ménard, p. 100.)