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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/270

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SUR DU GUESCLIN.

où leur longue disette les avoit plongé ; qu’ils leur donneroient donc la liberté de s’en retourner où bon leur sembleroit, sans aucunement les troubler dans leur marche. Mais Bertrand qui vouloit jouer des mains, luy répondit dans le langage de ce temps-là : Gentil herault vous sçavez moult bien preschier. Vous direz à vôtre retour par de là, que se Dieu plaît je mangeray aujourd’huy du captal un quartier, et ne pense aujourd’huy à manger d’autre char.

Cette fiere réponse fit comprendre au captal qu’il ny avoit plus rien à ménager avec Guesclin. Ce fut la raison pour laquelle il commanda sur l’heure qu’on se mît sous les armes et que l’on commençât l’attaque. Les valets et les enfans perdus des deux camps en vinrent les premiers aux mains, et s’acharnèrent les uns sur les autres avec tant de rage et de furie, que le sang en couloit de toutes parts. Cependant les goujats françois eurent de l’avantage sur ceux des Anglois ; ce qui fut un heureux augure pour Bertrand, qui se flatta de la victoire, voyant de si beaux preliminaires. Après que les enfans perdus se furent separez, il y eut un chevalier anglois qui se détacha de son gros, pour demander à faire un coup de lance contre celuy des François qui seroit assez brave pour vouloir entrer en lice avec luy. Roulant du Bois se présenta pour luy prêter le colet, sous le bon plaisir de Bertrand. Le François eut encore de l’ascendant sur l’Anglois, car non seulement il perça les armes et la cuirasse de celuy-cy, mais le coup ayant porté bien avant dans la chair, le chevalier anglois fut renversé de son cheval à la veüe des deux camps, ce qui fut une grande confusion pour ceux de son party, qui de