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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/371

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ANCIENS MÉMOIRES

toit plus maître de Tolède et qu’on le cherchoit par tout pour le prendre. Il se mit à faire beaucoup d’imprécations contre sa mauvaise fortune, disant qu’il n’avoit aucuns sujets fidelles, et que tous se faisoient un mérite de le trahir, les religieux de même que les séculiers, et que s’il pouvoit jamais tenir Bertrand dans ses mains, il assouviroit sur luy toute sa cruauté.

Le comte de Castres luy voyant plaindre son malheureux sort, luy conseilla de s’accommoder avec Henry à condition de luy laisser Cardonne, Tolede et Seville dont ce prince luy feroit hommage, et luy rendroit la ville de Burgos ; qu’outre cette condition reciproque il pouroit compter à Bertrand la somme de deux cens mille livres pour la partager avec ceux qui l’avoient accompagné dans cette expedition, l’assurant qu’avec ce petit sacrifice toute cette armée se dissiperoit et ne se pouroit jamais rallier, et qu’il luy seroit fort aisé par là de triompher en suite d’Henry, qui, se voyant privé de tout ce secours, periroit infailliblement et ne luy pouroit plus contester la Couronne.

Cet avis étoit si judicieux et si sensé, que Pierre y entra volontiers avec toute sa Cour. Il fallut donc jetter les yeux sur quelques personnes insinüantes, sages et discrettes, qui pussent ménager avec succés une negociation de cette importance. On choisit des ambassadeurs de cette trempe et de ce caractere, qui se rendirent en grande diligence au camp des ennemis, qu’ils trouvèrent assis auprés d’une riviere qui couloit prés de cette forest qui leur avoit fait tant de peine à passer. Henry, Bertrand et toute la compagnie blanche se rafraîchissoient auprés de ces eaux.