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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/438

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SUR DU GUESCLIN.

contre le prince de Galles et le roy Pierre, par la perfidie ou au moins par la lâcheté des Espagnols, qui l’avoient abandonné dans le combat, se jettans au travers des bois et de la riviére pour se sauver.

Ce chevalier plaignit beaucoup le sort de cet infortuné prince, disant qu’il souhaitoit fort que le ciel le prit en sa protection. La curiosité le menant plus loin, il luy demanda si Bertrand Du Guesclin, le Besque de Vilaines et le maréchal d’Andreghem avoient été pris dans cette journée. Les pèlerins l’assûrerent qu’ouy ; sur quoy le chevalier continüant de s’entretenir avec eux, dit qu’il croyoit que le prince de Galles n’étoit pas à se repentir d’avoir si bien servy le roy Pierre, qui n’étoit qu’un ingrat, et qui ne l’avoit payé que de belles paroles, sans luy donner un seul denier de ce qu’il luy avoit promis. Henry ne voulut point se découvrir au chevalier, qui leur dit que s’ils avoient besoin de son service, il les meneroit jusqu’au palais, où, par son crédit, il leur feroit donner du meilleur vin, qu’ils boiroient en l’honneur de Saint Jaques, afin qu’il se rendît intercesseur dans le ciel pour le roy Henry, dont la cause luy paroissoit si juste et si raisonnable. Les pèlerins luy sçachans bon gré de ses offres obligeantes le suivirent jusqu’au palais du roy d’Arragon. Ce chevalier les posta dans un lieü vis à vis de la table où ce prince mangeoit, afin qu’il les pût découvrir de loin. Cette situation dans laquelle il les avoit placez fit tout l’effet qu’il s’en promettoit ; car le Roy les ayant apperçu leur envoya quelques mets de sa table, et quand il eut achevé son repas, la curiosité le fit approcher d’Henry pour apprendre de luy quelque nouvelle, luy disant :