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Page:Pierron - Histoire de la littérature grecque, 1875.djvu/167

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POÉSIE CHOLIAMBIQUE. PARODIE. APOLOGUE.

aux oreilles des Grecs ; mais, quand cette matière poétique eut grossi, et que toutes les conversations s’égayaient des mots heureux attribués au vieil esclave, il ne dut pas manquer de poëtes pour s’exercer sur des sujets si bien préparés, et pour dessiner les premiers traits de ce qui devint un jour l’ample comédie à cent actes divers. Mais les noms mêmes de ces fabulistes ne nous sont point parvenus. Les poëtes du sixième ou même du cinquième siècle dont on cite des apologues, n’étaient fabulistes, comme Hésiode et Archiloque, qu’en passant et par occasion. Nous savons que Socrate, dans sa prison, se récréait en versifiant des fables ésopiques. Dira-t-on qu’il était le premier qui eût eu l’idée d’ajouter par la forme au mérite de ces leçons de sagesse ? C’est par conjecture aussi qu’on suppose que les premiers fabulistes grecs se servirent de l’ïambe, de préférence à tout autre mètre, et du trimètre scazon, de préférence au trimètre d’Archiloque et de Simonide d’Amorgos. Babrius et d’autres ont écrit leurs fables en choliambes. Ils ne faisaient sans doute que se conformer à un usage établi.


Ésope.


Quant à l’homme fameux dont tous les fabulistes ne sont, suivant la tradition vulgaire ; que les héritiers et les copistes, voici ce qu’on sait d’à peu près authentique sur sa personne et sa vie. Il était né à Mésembrie dans la Thrace, et il était contemporain du roi égyptien Amasis. Il fut d’abord esclave d’un Samien, nommé Iadmon. Son esprit et sa bonne conduite lui valurent la liberté. Il ne cessa pas pourtant de vivre dans la famille de son ancien maître, comme ami, comme conseiller, ou à quelque autre titre honorable. Ce qui prouve qu’il ne resta pas toujours esclave, c’est qu’on le voit se porter pour défenseur en justice d’un homme accusé de délits politiques, et faire ainsi acte de citoyen. Ce que l’on conte de ses pérégrinations est assez vraisemblable, et n’est point en contradiction avec les témoignages qui concernent son long séjour à Samos. Il habitait d’ordinaire dans la maison. d’Iadmon, mais une humeur aventureuse, le désir de voir et de s’instruire, le soin peut-être des affaires de son protecteur, suffisent pour