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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/134

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LA RÉUNION

mettre des colonnes mobiles de gardes nationaux à la disposition du général commandant la division de Bruxelles. La consigne était donnée de ne voir dans les insurgés que des « brigands », réunis pour « piller les propriétés et massacrer les fonctionnaires publics », et de les traiter comme tels.

Dès la fin d’octobre, le mouvement était enrayé. Il avait atteint à ce moment la région de Roulers et de Courtrai en Flandre, d’où il cherchait à déborder sur le Tournaisis. Du Luxembourg, le Klüppelkrieg, se propageant vers le Nord et vers l’Ouest, avait menacé un instant Saint-Hubert et Stavelot. La technique des paysans de cette région boisée était celle que les Vendéens avaient pratiquée. « Ils se réunissent en masse pour résister ; sont-ils rompus et repoussés, ils se sauvent chacun chez eux et la troupe qui les poursuit les rencontre à travailler paisiblement dans les champs et dans les villages »[1].

La lutte fut le plus opiniâtre en Campine. Un chef énergique et habile, Emmanuel-Benoit Rollier, avait réussi à en prendre la direction. Il avait constitué entre le canal de Willebroeck, le Rupel et l’Escaut, une sorte de camp retranché où il parvint à se maintenir assez longtemps. Sur le point d’être tourné, il s’était échappé par une adroite retraite et, au moment où le général Collaud, croyant tout danger écarté, venait de lever l’état de siège à Bruxelles, il paraissait tout à coup devant Diest et s’en emparait. Aussitôt encerclé par les troupes du général Jardon qui le poursuivaient, il refusa de se rendre, contint l’ennemi par de vigoureuses sorties et, à la faveur de la nuit, se glissa hors de la place en traversant les marais du Démer (15 novembre). Durant quelques jours, traqué par les Français, il manœuvra entre Diest, Tirlemont et Saint-Trond, puis se jeta enfin dans Hasselt (4 décembre). Trois mille cinq cents paysans le suivaient encore. À l’aube du jour suivant, sur la Grand’Place, des prêtres leur donnèrent l’absolution générale. On combattit de dix heures du matin à quatre heures du soir. Mais les insurgés étaient vaincus d’avance. Leur courage céda lorsque le canon eut abattu les portes de la ville.

  1. Lanzac de Laborie, op. cit., t. I, p. 228.