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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/189

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LES CLASSES RURALES

compte que le relèvement de la Belgique s’effectua, somme toute, dans des circonstances anormales, qui ne font que le rendre plus significatif et, si l’on peut dire, plus honorable.

II

Ce qui frappe dans ce relèvement, c’est qu’il est essentiellement de nature industrielle. C’est l’industrie qui l’a provoqué, qui lui imprime ses traits caractéristiques et qui l’oriente dans la voie où il ne doit plus cesser de progresser jusqu’à nos jours. Sans doute, elle avait déjà donné depuis le milieu du XVIIIe siècle des promesses pleines d’avenir[1]. Dans l’ensemble pourtant, la Belgique était encore, lors de son annexion à la République française, un pays surtout agricole. Et il put sembler tout d’abord que la grande crise qu’elle traversa de 1792 à 1798, aurait pour conséquence d’accentuer encore ce caractère. Car elle fut bien moins cruelle pour les campagnes que pour les villes.

La population rurale se trouva beaucoup plus froissée dans ses sentiments religieux que dans ses intérêts par le régime instauré depuis Fleurus. Si étonnant que cela paraisse à première vue, on peut dire que les institutions républicaines ne modifièrent qu’à la surface ses conditions d’existence. Les réformes introduites sous Marie-Thérèse et Joseph II n’avait laissé subsister que bien peu de chose du régime féodal. Quand son abolition fut proclamée en Belgique, on ne s’aperçut guère du changement. Les dîmes, qui furent supprimées en même temps que lui, étaient une charge plus lourde et dont la disparition fut certainement saluée avec joie. C’est elle, constatent en 1796 les agents du Directoire « qui est notre premier et principal titre à l’attachement du cultivateur à la cause française »[2]. Encore ne faut-il pas exagérer ses résultats. Elle

  1. Histoire de Belgique, t. V, 2e édit., p. 273 et suiv.
  2. P. Verhaegen, La Belgique sous la domination française, t. II, p. 500.